Informations générales
Autre nom(s): | Canal du Languedoc; Canal des Deux-Mers |
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Début des travaux: | 1660 |
Achèvement: | 1681 |
Etat: | en service |
Type de construction
Fonction / utilisation: |
Canal |
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Prix et distinctions
Situation de l'ouvrage
km | Nom |
Informations techniques
Dimensions
longueur totale | 240 km |
Coût
coût de construction | livres 5 000 000 |
Chronologie
1539 | A la demande du roi François Ier, Nicolas Bachelier, architecte toulousain, étudie le projet d'amener la Garonne jusqu'à Narbonne. |
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1563 | Henri Ier de Montmorency, gouverneur du Languedoc, visite la côte du Languedoc pour construire un port. Il choisit le site de Sète où les travaux dureront de 1596 à 1605. |
1598 | Nouveau projet de canal par P. Reneau. C'est un canal à point de partage entre la Garonne et lAude. Le seuil de Narouze est alimenté par lAriège. |
12 janvier 1618 | Un nouveau projet de canal est proposé par Bernard d'Arribat de Béziers aux états du Languedoc. Guillaume Riquet, père de Pierre Paul Riquet, fait partie de ceux qui s'opposent au projet. Les Riquet sont une famille d'origine florentine, les Arrighetti, installés en France depuis le 13ème siècle qui franciseront leur nom progressivement en Riquetti puis Riquet. |
1633 | Nouveau projet de canal. |
1652 | Riquet acquiert le château de Bonrepos près de Verfeil, dans la paroisse de Saint-Jean-de-Montagne, dans la Montagne Noire. Riquet parcourt la montagne avec le fontainier Pierre Campmas. |
avant 1660 | François Andréossy voyage en Italie du Nord où il voit les écluses presque circulaires de la Brenta. |
15 novembre 1662 | Pierre-Paul Riquet adresse un mémoire à Colbert donnant les grandes lignes d'un projet de construction d'un canal permettant de relier l'océan Atlantique à la mer Méditerranée. |
18 janvier 1663 | Arrêt du Conseil du Roi créant une commission d'experts comprenant:
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1665 | La commission donne un avis favorable mais demande à Riquet la construction d'une rigole d'essai. |
octobre 1665 | Pierre-Paul Riquet creuse une rigole d'essai pour amener l'eau de la Montagne Noire au Seuil de Naurouze. |
1666 | Le chevalier Louis Nicolas de Clerville (mort en 1677), ingénieur militaire, rédige le devis de la «première entreprise» du canal: construction des rigoles d'alimentation, des réservoirs et du canal de Toulouse jusqu'à Trèbes. |
5 octobre 1666 | Édit de Saint-Germain-en-Laye du roi Louis XIV ordonnant l'exécution du canal. |
5 octobre 1666 | Un simulacre d'appel d'offres adjuge le marché à P.-P. Riquet comme entrepreneur et propriétaire du fief nouvellement créé. |
1667 | François Andréossy, ingénieur adjoint de Riquet, publie des plans du canal sous le titre «Carte du canal du Languedoc» en s'attribuant la conception du projet. Riquet fait part à Colbert de son mécontentement. |
1667 — 1674 | Construction du canal de Toulouse (à 132 m) à Castelnaudary en franchissant le seuil de Naurouze (à 194 m). Construction des rigoles d'alimentation de la Montagne Noire et de la Plaine qui captent les eaux de la Montagne Noire, des réservoirs du Lampy et de Saint-Ferréol (1667 à 1672 par P.-P. Riquet). |
15 avril 1667 | Pose de la première pierre de la digue de barrage de Saint-Ferréol en présence de l'archevêque de Toulouse. |
29 juillet 1667 | Bénédiction de la première pierre du Port Saint-Louis au Cap de Sète. Sète est choisie comme extrémité du canal en Méditerranée. |
17 novembre 1667 | Le Parlement de Toulouse, les capitouls de la ville et l'archevêque, Mgr d'Anglure de Bourlemont, assistent à la pose de deux premières pierres de l'écluse de Bazacle. |
1668 | Nouvel appel d'offres pour la «deuxième entreprise»: prolongement du canal de Trèbes à la mer Méditerranée. Le canal est creusé à flanc de pente en suivant les courbes de niveau. Il est supporté côté pente par un remblai provenant de l'excavation. Sur les 58km de la Grande Retenue le canal est maintenu sans écluse à l'altitude de 31,54m entre les écluses de Fonséranes, près de Béziers, jusqu'à celle d'Argens. |
1669 | Nouvel appel d'offres pour la construction du port de Sète. |
1670 | Mise en eau du canal de Toulouse à Castenet. |
1673 | Fin des travaux du premier tronçon à Trèbes de 110 km de long. |
1674 | Mise en eau du canal jusqu'au seuil de Naurouze, puis jusqu'à Castelnaudary. |
1676 | Construction du pont-canal du Répudre. |
1679 | Le canal arrive devant la colline d'Ensérune au lieu-dit Le Malpas. |
1 octobre 1680 | Mort de Pierre-Paul Riquet criblé de dettes. Mais son oeuvre est presque terminée. |
1er trimestre 1681 | Fin de la construction du canal entre Castelnaudary et Béziers par ses deux fils, Jean Mathias, baron de Bonrepos, et Pierre Paul, comte de Caraman. |
15 mai 1681
— 25 mai 1681 |
Inauguration du canal. La barque amirale, suivie d'une vingtaine de barques chargées de produits étrangers, fait la première visite et inspection du canal. Elle comprend l'intendant du Languedoc d'Aguesseau, le commis à la surveillance des travaux La Feuille, l'ingénieur François Andréossy et la famille Riquet. |
19 mai 1681 | Monseigneur de Bonzy, archevêque de Narbonne bénit les embarcations à Castelnaudary. |
1681 | Mais le canal a été achevé trop rapidement. Il a dû être mis à sec pour terminer certains ouvrages. |
1683 | Remise en eau du canal. |
31 mars 1683
— 9 avril 1683 |
Deuxième navigation officielle constatant la perfection du canal. |
1684 | Réception des travaux par l'intendant d'Aguesseau. |
1685 | Le canal est ensablé et de nombreux ouvrages se dégradent. |
1686 — 1689 | Vauban étudie un projet d'amélioration du canal. Pour pallier au manque d'eau il propose de prolonger de 7200 m la rigole de la Montagne vers le bassin de Saint-Ferréol en creusant la percée de Cammazes de 120 m de long. |
mars 1686 | Visite de Vauban puis rapport au roi dans lequel il fait l'éloge de l'aqueduc du Répudre et obtient d'en multiplier l'usage aux frais du roi. |
1687 — 1693 | Un chantier est rouvert sous les ordres d'Antoine Niquet, ingénieur général des fortifications de Provence et du Languedoc et de Jean-Baptiste Minet, ingénieur chargé de la direction des ouvrages. |
1688 | Début de la construction d'un canal de jonction entre le canal du Midi et le canal de la Robine par Antoine de Niquet. Mais les travaux sont interrompus. |
1688 | Pont-canal de Trèbes sur l'Orbiel construit sur les plans de François Andréossy. Il a trois arches, et "est assez large pour faire passer deux barques de front... On a rempli les reins de la voûte par de bonnes maçonneries pour mettre tout de niveau; ensuite on y a étendu une couche de ciment, pour que les eaux passant dessus le pavé qui sert de lit au canal, ne pussent pas transpirer au travers des arches dont elles eussent causé la ruine sans cette précaution" (Jérôme de la Lande - Des canaux de navigation ey spécialement du canal du Languedoc, Veuve Desaint - 1778). |
1689 — 1960 | Construction du pont-canal de la Cesse sur les plans de Vauban par le maître-maçon Jean Goudet. |
1693 | Epanchoir de surface d'Argent-Double (Laredote-Aude) construit par Jean David, maître maçon de Béziers. |
1694 | Epanchoir à fond des Patiasses en amont du pont-canal de la Cesse. |
1695 — 1713 | Henri (ou Hubert) Gautier travaille au canal du Midi sous les ordres de Niquet. |
1736 | Le canal de Jonction avec la Robine est remis à l'ordre du jour. L'opposition des villes de Béziers, Agde et Sète bloque le projet. |
octobre 1766 | Des fortes pluies, en gonflant les eaux, provoquent de graves dégâts sur ouvrages: ponts détruits, vannes brisées. Un brèche de 35 mètres de long est ouverte en face du village de Capestang. Pendant deux mois, 6000 ouvriers construisent un ouvrage maçonné. |
31 janvier 1767 | Le canal est remis en navigation. |
1768 | Les états du Languedoc envisagent de racheter le canal du Midi aux descendants de Riquet. |
1770 | Pose de la première pierre du canal de Brienne par l'archevêque de Toulouse, Loménie de Brienne. |
1770 — 1774 | Pont du Sommail sur le canal du Midi par François Garipuy. |
1776 | Epanchoirs à siphon de Capestang et de Ventenac par Bertrand Garipuy. |
1776 | Fin de la construction du canal de Brienne à Toulouse reliant la Garonne au canal du Midi au droit des Ponts-Jumeaux. |
1777 — 1787 | Construction du canal de jonction au canal de la Roubine vers Narbonne par l'ingénieur François Garripuy. Réalisation du bassin réservoir du Lampy pour permettre une alimentation en eau supplémentaire et de l'épanchoir de Gaillousty sur le canal de jonction. |
1787 — 1810 | Construction d'un détournement du canal pour le faire passer par Carcassonne. |
13 mai 1787
— 21 mai 1787 |
Thomas Jefferson, alors ambassadeur des États-unis à Paris, visite le canal du Midi pour «examiner de près les ouvrages du canal de Languedoc, afin de voir si de semblable liaison pourrait être aménagée en Amérique». |
1793 | La propriété exclusive de la famille Riquet est abolie. |
1806 | Intervention sur le pont-aqueduc de l'Hers par Jean-Polycarpe Maguès. |
1808 | Mise en service du canal de Beaucaire entre Sète et Beaucaire sur le Rhône de 97 km de long. |
1810 | La Compagnie Générale du canal du Midi est fondée, dont Napoléon Ier possède la majorité des parts. |
1823 | La famille Riquet récupère une partie de la propriété du canal. |
1827 — 1836 | Construction du port Saint-Sauveur par Jean-Polycarpe Maguès. |
1834 — 1840 | Construction des formes de radoub au port Saint-Sauveur de Toulouse par Urbain Maguès qui vient de succéder à son père. |
1838 — 1852 | Le canal est prolongé au-delà de Toulouse par le canal latéral à la Garonne. |
1854 | Construction du pont-canal de l'Orb par Urbain Maguès. |
1858 | La Compagnie de chemin de fer du Midi prend à bail le canal dont le trafic diminue. |
1897 | Rachat par l'État français du canal du midi aux héritiers de Pierre-Paul Riquet. |
7 décembre 1996 | Classé au Patrimoine mondial de l'humanité par l'UNESCO. |
Remarques
Plus grand barrage réservoir: réservoir de Saint-Ferréol = 5 millions de m³ permettant de recueillir les eaux de la Montagne Noire
Premier pont-canal: pont-canal de Répudre.
Premier tunnel pour un canal de navigation: tunnel de Malpas.
Prolongations:
- canal de jonction au canal de la Robine,
- canal du Rhône,
- canal latéral à la Garonne
Seuil de Naurouze
Le seuil de Naurouze est un ouvrage dans l'ouvrage. C'est la solution du problème de l'amenée en quantité suffisante d'eau au point de partage des eaux qui conditionnait la réussite du projet.
Ouvrages au seuil de Naurouze:
- arrivée de la rigole du canal du Midi,
- bassin de Naurouze,
- épanchoir de Naurouze vers le Fresquel,
- déversoir de Naurouze (à la place de l'ancienne écluse de la Méditerranée)
- écluse de l'Océan (à la place de l'ancienne écluse de Montferrand)
- partage des eaux,
- station de pompage de Naurouze,
- obélisque Riquet.
Extrait de la Wikipédia
Le canal du Midi est un canal français de navigation à seuil de partage qui relie Toulouse à la mer Méditerranée depuis le xviie siècle. D'abord nommé « canal royal de Languedoc »., les révolutionnaires le rebaptisent en 1789 « canal du Midi ». À partir du xixe siècle, le canal de Garonne, qui double la Garonne de Bordeaux à Toulouse, prolonge le canal du Midi pour fournir une voie navigable de l'océan Atlantique à la mer Méditerranée : l’ensemble des deux canaux est dénommé « canal des Deux-Mers ».
Ouvrage d'art exceptionnel, considéré par ses contemporains comme le plus grand chantier du XVIIe siècle, le canal du Midi révolutionne le transport fluvial et la circulation dans le Midi de la France de l'Ancien Régime. Le défi, relevé par Pierre-Paul Riquet, son concepteur, fut d'acheminer l'eau de la montagne Noire jusqu'au seuil de Naurouze, le point le plus élevé du canal. Jean-Baptiste Colbert autorise le début des travaux par un édit royal d'octobre 1666. Supervisé par Pierre-Paul Riquet, le chantier dure de 1666 à 1681, sous le règne de Louis XIV.
Le canal du Midi est l'un des plus anciens canaux d'Europe toujours en fonctionnement. Depuis 1996, il est inscrit sur la liste du patrimoine mondial de l'UNESCO.
Présentation
Localisation et profil du canal
Le canal du Midi se situe dans le sud de la France, sur les départements de l'Hérault, de l'Aude et de la Haute-Garonne. Il court sur 241 kilomètres entre Marseillan, au lieu-dit Les Onglous où il débouche dans l'étang de Thau près de Sète qui le relie au port de commerce de Sète, et Toulouse, au niveau du port de l'Embouchure (Ponts-Jumeaux).
Le canal du Midi est un canal à bief de partage avec un versant situé du côté Atlantique d'une longueur de 57 km et l'autre du côté Méditerranée d'une longueur de 189 km. Le bief de partage du seuil de Naurouze constitue la section la plus élevée.
Le mouillage (profondeur du canal) est de 2 m en moyenne avec un minimum de 1,8 m. Le tirant d'eau autorisé est de 1,6 m. La largeur au miroir (surface du canal) varie entre 16 m et 20 m. Enfin, la largeur au plafond (fond du canal) est de 10 m:57.
Profil du canal du Midi (distances en mètres en abscisse depuis la valeur 0 à Toulouse et hauteurs en mètres en ordonnée).
Le graphique ci-contre donne le profil du canal du Midi depuis Toulouse (1), en passant par le seuil de Naurouze (2), Castelnaudary (3), puis Carcassonne (4) et Trèbes (5). Le canal se poursuit à Béziers juste après le passage des écluses de Fonserannes (6), puis continue à Agde (7) et termine sa course à Sète dans l'étang de Thau (8). Le seuil de Naurouze est le point le plus élevé du canal (190 m) avec une dénivellation de 57,18 m entre le seuil et Toulouse et 189,43 m entre le seuil et Sète.
Le bief le plus long mesure 53,87 km entre l'écluse d'Argens (Aude) et les écluses de Fonserannes (Hérault) tandis que le bief le plus court (105 m) se situe entre les deux écluses du Fresquel.
Par convention, le sens Toulouse-Sète est dit « montant » et, dans le sens opposé, « descendant » quelles que soient les montées ou descentes dues à l'éclusage.
À Sète, le canal du Midi a été prolongé par le canal du Rhône à Sète. Une branche latérale du canal du Midi, l'embranchement de La Nouvelle, passe par Narbonne et débouche sur la Méditerranée à Port-la-Nouvelle.
Statut
Pour des raisons historiques, le canal du Midi présente une situation juridique originale, qui a été codifiée en 1956 au Code du domaine public fluvial et de la navigation intérieure, puis au Code général de la propriété des personnes publiques. En vertu de l’article L. 2111-11 de ce code, le domaine public du canal reste fixé par référence au fief concédé jadis à Pierre-Paul Riquet, et ses limites ont été fixées par des procès-verbaux établis en 1772. S'y ajoutent les logements du personnel et les entrepôts, ainsi que le réservoir de Lampy. Les articles L. 2124-20 à L. 2124-25 fixent les règles relatives à l'entretien du canal, lequel est globalement à la charge de la personne publique propriétaire, avec participation des communes et dans certains cas, des riverains.
Depuis la loi du 27 novembre 1897, l'État est le propriétaire du canal du Midi et délègue sa gérance à l'office des Voies navigables de France sous tutelle du Ministère de l'Environnement, de l'Énergie et de la Mer.
Histoire
Des projets abandonnés
Le creusement de ce canal est une vieille idée. Nombreux et parfois utopiques sont les projets imaginés pour relier par un canal l'océan Atlantique et la mer Méditerranée. Des dirigeants comme Auguste, Néron, Charlemagne, François Ier, Charles IX et Henri IV y avaient songé:11, car c'est un véritable enjeu politique et économique. En effet, la construction d'un tel ouvrage permet d'éviter aux bateaux (bateaux de commerce mais aussi galères du roi) et aux marchandises de prendre la mer et de contourner la péninsule Ibérique. À cette époque, le transport maritime comporte de nombreux dangers comme le brigandage, les pirates et corsaires barbaresques.
Les projets les plus réalistes sont présentés au roi au XVIe siècle. Un premier projet est présenté par Nicolas Bachelier en 1539 aux États généraux du Languedoc, puis un second en 1598 par Pierre Reneau:23, et enfin un troisième projet proposé par Bernard Arribat de Béziers en 1617:8. Mais ces projets sont abandonnés car ils ne sont pas assez pensés au niveau de l'alimentation en eau du canal et proposent un système de dérivation des eaux des rivières des Pyrénées trop complexe voire impossible à mettre en œuvre. En 1650, un autre ingénieur propose aussi de détourner l'eau de l'Ariège à Cintegabelle pour l'amener par un canal non navigable jusqu'à Pech-David près de Toulouse. Mais, là aussi, se pose la question de mener l'eau jusqu'au seuil de Naurouze plus haut que Toulouse:9.
Les projets ne sont donc pas lancés par crainte de perdre trop d'argent et par conviction de l'impossibilité humaine de creuser un tel canal. Cependant, Pierre-Paul Riquet, un percepteur de la gabelle en Languedoc, propose un projet plus convaincant que les précédents. Lorsque Louis XIV reçoit sa proposition par l'entremise de l'archevêque de Toulouse, Mgr d’Anglure, en 1662, il y voit l'opportunité de priver l'Espagne d'une partie de ses ressources, et l'occasion de marquer son règne d'une œuvre impérissable.
Lettre de P.-P. Riquet à Colbert, en date du 15 novembre 1662, par le secrétaire de Riquet Photographie de la lettre, Archives du canal, Toulouse.
« Monseigneur,Je vous escrivis de Perpinian le XXVIII du mois dernier au subject de la ferme des gabelles du Rouissillhon et aujourd’huy je fais mesme chose de ce village, mais sur un subject bien esloigné de cette matière là. C’est sur celle du dessein d’un canal qui pourroit se faire dans cette province du Languedoc pour la communication des deux mers Océane et Méditerranée, vous vous estonnerés Monseigneur que j’entreprenne de vous parler d’une chose qu’apparemment je ne cognois pas et qu’un homme de gabelle se mesle de nivellage…Mais vous excuserez mon entreprise lors que vous saurés que c’est de l’ordre de monseigneur l’archevesque de Tolose que je vous écris. Il y a quelque temps que ledit seigneur me fit l’honneur de venir en ce lieu, soit à cause que je luy suis voisin et omager ou pour savoir de moi les moyens de fere ce canal, car il avoit ouy dire que j’en avoit faict une estude particulière, je luy dis ce que j’en savois et luy promis de l’aller voir à Castres à mon retour de Perpinian, et de le mener sur les lieux pour lui en fere voir la possibilité.Je l’ay fait, et ledit seigneur en compagnie de Monsieur l’évesque de Saint-papoul et de plusieurs autres personnes de condition a esté visiter toutes choses qui s’estant trouvées comme je les avois dites, ledit seigneur archevesque m’a chargé d’en dresser une rellation et de vous l’envoyer, elle est icy incluse mais en assez mauvais ordre, car, n’entendant ni grec ni latin et à peyne sachant parler françois, il ne m’est possible que je m’explique sans bégayer ; aussi ce que j’entreprens est par ordre et pour obéyr et non pas de mon mouvement propre.Touttesfoix Monseigneur s’il vous plaic de vous donner la peine de lire ma rellation vous jugerés qu’il est vray que ce canal est faisable, qu’il est à la vérité difficille à cauze du coust mais que regardant le bien qui doibt en arriver l’on doibt fere peu de concidération de la despence. Le feu roy henry quatriesme ayeul de notre Monarque désira passionnement de fere cet ouvrage, feu Monsieur le Cardinal de Joyeuse avoit commansé d’y fere travailler et feu Monsieur le Cardinal de Richelieu en souhaitoit l’achèvement, l’histoire de France, le recueil des œuvres dudit Cardinal de Joyeuse et plusieurs autres éscrits justiffient cette vérité ; mais jusques à ce jour l’on n’avoit pas pansé aux rivières propres à servir ni sceu trouver de routtes aizées pour ce canal, car celles qu’on s’estoit alors imaginées estoient avec des obstacles insurmontables de rétrogradation de rivières et de machines pour élever les eaux.Aussi je crois que ces difficultés ont tousjours cauzés le dégoût et recullé l’exécution de l’ouvrage mais aujourd’huy Monseigneur, qu’on trouve de routtes aizées et de rivières quy peuvent estre facillement destournées de leur anciens lits et conduites dans ce nouveau canal par pente naturelle et de leur propre inclination, touttes difficultés cesent, excepté celle de trouver un fond pour servir aux frais du travail.Vous avez pour cela mille moyens Monseigneur, et je vous en présente encore deux dans un mien memoire cy-joint afin de vous porter plus de considérer que la facilité et l’assurance de cette nouvelle navigation fera que les destroits de Gilbratar cessera d’estre un passage absolument nécessaire, que les revenus du Roy d’Espaigne à Cadix en seroit diminués et que ceux de notre Roy augmanteront d’aultant sur les fermes des entrées et sorties des marchandises en ce royaume, oultre les droicts qui se prendront sur ledit canal qui monteront à des sommes immenses, et que les subjects de sa Majesté en general proffiteront de mille nouveaux commerces et tireront de grands avantages de cette navigation, que sy j’aprans que ce dessein vous doibve plaire je vous l’envoyeré avec le nombre des ecluses qu’il conviendra fere et un calcul exact des toises dudit canal, soit en longueur soit en largeur. »
Orthographe et syntaxe modernisées :
« Monseigneur, Je vous écrivais de Perpignan, le 28 du mois dernier, au sujet de la ferme des gabelles du Roussillon et aujourd'hui, je fais la même chose de ce village, mais sur un sujet bien éloigné de cette matière-là. C'est sur celle du dessein d'un canal qui pourrait se faire dans cette province du Languedoc pour la communication des deux mers Océane et Méditerranée, vous vous étonnerez, Monseigneur, que j'entreprenne de vous parler d'une chose qu'apparemment je ne connais pas et qu'un homme de gabelle se mêle de nivelage... Mais, vous excuserez mon entreprise lorsque vous saurez que c'est sur l'ordre de Monseigneur l'archevêque de Toulouse que je vous écris. Il y a quelque temps que ledit seigneur me fit l'honneur de venir en ce lieu, soit à cause du fait que je suis son voisin et hommager ou pour savoir de moi les moyens de faire ce canal, car il avait ouï dire que j'en avais fait une étude particulière, je lui dis ce que j'en savais et lui promis d'aller le voir à Castres à mon retour de Perpignan, et de le mener sur les lieux pour lui en faire voir la possibilité. Je l'ai fait, et ledit seigneur en compagnie de monsieur l'évêque de Saint-Papoul et de plusieurs autres personnes de condition a été visiter toutes choses qui furent trouvées comme je lui avais dit, ledit Seigneur Archevêque m'a chargé d'en dresser une relation et de vous l'envoyer, elle est ici incluse mais en assez mauvais ordre, car, n'entendant ni grec, ni latin et à peine sachant parler le français, il ne m'est possible que je m'explique sans bégayer ; aussi ce que j'entreprends est par ordre et pour obéir et non pas de mon propre mouvement. Toutefois, Monseigneur, s'il vous plaît de vous donner la peine de lire ma relation, vous jugerez qu'il est vrai que ce canal est faisable, qu'il est à la vérité difficile à cause du coût mais que regardant le bien qui doit en arriver l'on doit faire peu de considération de la dépense. Le feu roi Henri Quatre, aïeul de notre monarque, désira passionnément faire cet ouvrage, feu monsieur le cardinal de Joyeuse avait commencé d'y faire travailler et feu monsieur le cardinal de Richelieu en souhaitait l'achèvement, l'Histoire de France, le recueil des œuvres dudit cardinal de Joyeuse et plusieurs autres écrits justifient cette vérité ; mais jusqu'à ce jour, l'on n'avait pas pensé aux rivières propres à servir ni trouvé des routes aisées pour ce canal, car celles qu'on s'était alors imaginé étaient avec des obstacles insurmontables de rétrogradation de rivières et de machines pour élever les eaux. Aussi, je crois que ces difficultés ont toujours causé le dégoût et reculé l'exécution de l'ouvrage, mais, aujourd'hui, Monseigneur, qu'on trouve des routes aisées et des rivières qui peuvent être facilement détournées de leurs anciens lits et conduites dans ce nouveau canal par pente naturelle et de leur propre inclinaison, toutes difficultés cessent, exceptée celle de trouver un fonds pour servir aux frais de travail. Vous avez pour cela mille moyens, Monseigneur, et je vous en présente encore deux dans un de mes mémoires ci-joints afin de vous porter plus de considérer que la facilité et l'assurance de cette nouvelle navigation fera que les détroits de Gibraltar cesseront d'être un passage absolument nécessaire, que les revenus du roi d'Espagne à Cadix en seront diminués et que ceux de notre roi augmenteront d'autant sur les fermes des entrées et sorties des marchandises en ce royaume, outre les droits qui se prendront sur ledit canal qui monteront à des sommes immenses, et que les sujets de Sa Majesté en général profiteront de mille nouveaux commerces et tireront de grands avantages de cette navigation, que si j'apprends que ce dessein doit vous plaire, je vous l'enverrais avec le nombre d'écluses qu'il conviendra de faire et un calcul exact des toises dudit canal, soit en longueur, soit en largeur. »
Étude du projet
La gestion des fleuves étant difficile, seul un canal s'impose entre l'océan Atlantique et la mer Méditerranée. Il est plus facile de gérer le débit d'un canal que celui d'un fleuve pour maintenir un trafic régulier tout au long de l'année. Le canal du Midi est un canal à bief de partage car il doit franchir une hauteur entre deux vallées. En effet, la construction de ce canal nécessite le passage du seuil de Naurouze ou du seuil de Graissens:13. Trente ans avant le commencement des travaux, l'étude d'un projet similaire avait été confiée à une assemblée dont le père de Riquet faisait partie.
En 1642 avait été inauguré le canal de Briare, premier canal à bief de partage construit en France. Sa construction avait été reprise en 1635 par les frères Boutheroüe et Jacques Guyon. Son exploitation avait montré les difficultés dues au manque d'eau au niveau du bief de partage en été. Hector Boutheroüe, un jeune frère des concessionnaires du canal de Briare va intervenir comme expert en hydraulique auprès des États du Languedoc pour donner son avis sur les projets présentés sur ce canal. Riquet a visité le canal de Briare à son inauguration. Le problème de l'alimentation au niveau de son point haut, le seuil de Naurouze, est rapidement devenu un enjeu pour assurer la faisabilité du canal. Riquet a acheté vers 1652 la seigneurie de Bonrepos puis, jusqu'en 1658, tous les droits sur l'eau de la communauté de Revel située à proximité. Cela lui permet de contrôler l'eau qui alimente Revel grâce à la rivière Sor et un canal de dérivation. C'est sa connaissance de l'hydrographie de la région de la montagne Noire qu'il a parcourue avec le fontainier de Revel Pierre Campmas qui a permis à Riquet de trouver la solution au problème de l'alimentation en eau du canal, en particulier en été, en faisant déboucher un canal de dérivation non pas dans le Sor et l'Agout mais au seuil de Naurouze en le faisant passer par le seuil de Graissens:19-21, 24 ; 192.
Points forts
En 1660, Riquet trouve la solution du principal problème : l’arrivée d’eau au point de partage afin d'alimenter les deux versants du canal. Son idée consiste à récupérer l'eau qui coule dans la montagne Noire. Sa connaissance importante de l'hydrographie de la montagne Noire et du Sor lui permet d'imaginer un système d'irrigation ingénieux:24. Il s'inspire de l'ingénieur français Adam de Craponne qui avait mis en œuvre le même système d'alimentation pour le canal de Craponne.
Pour cela, il projette de récupérer les eaux de la montagne dans des barrages-réservoirs puis de les acheminer vers le seuil de Naurouze grâce à des rigoles en traversant le seuil de Graissens. L'eau du Sor passant près de Revel est la principale alimentation envisagée par Pierre-Paul Riquet. Mais d'autres rivières de la Montagne Noire font aussi partie de son système d'alimentation comme l'Alzeau, le Laudot, le Rieutort, la Bernassonne et le Lampy:15. En effet, la montagne Noire est une région deux fois plus arrosée que la plaine du Lauragais avec 1 400 millimètres par an aux alentours de 500 à 600 m d'altitude:24, comment récupérer une quantité d'eau importante ? Pour stocker l'eau des rivières, il projette la création de trois bassins : le réservoir du Lampy-Vieux, un bassin portuaire hexagonal à Naurouze et la retenue de Saint-Ferréol.
En 1664, durant l'expertise du projet, les États du Languedoc demandent à Riquet de mettre en pratique son idée de façon expérimentale. Il fait alors construire une rigole d'essai déviant l'eau du Sor jusqu'au seuil de Naurouze. C'est la rigole de la plaine qu'il termine en 1665 et qui sert à prouver qu'il est possible d'amener de l'eau jusqu'au point le plus élevé du parcours du canal:26. C'est l'événement qui rassure la commission d'experts que le roi avait constituée sur place pour inspecter les choix et les plans dressés par Riquet. À partir de ce moment, Louis XIV sait que la construction du canal est techniquement possible:44.
Imprécisions de Pierre-Paul Riquet
Riquet étudie de façon approfondie l'alimentation du canal au niveau du seuil de Naurouze. Son étude semble rigoureuse et comporte une phase expérimentale avec la construction de la rigole de la plaine qui corrobore ses dires. Cependant, son projet reste imprécis sur de nombreux points notamment le tracé du canal. Ce tracé n'est pas définitif et n'est pas précis comme cela se ferait aujourd'hui pour un projet autoroutier ou de ligne à grande vitesse. Seules les directions du tracé sont connues et pointées sur une carte. Des changements sur le tracé peuvent être opérés par l'entrepreneur suivant les difficultés rencontrées sur le terrain:50.
Du côté Atlantique, il propose plusieurs tracés : l'un passerait par Castres et Revel via le seuil de Graissens et l'Agout. En effet, cette rivière était en cours d'aménagement pour la navigation:386. Un autre tracé passerait par la rivière le Girou et éviterait Toulouse comme le tracé précédent. Du côté méditerranéen, le tracé n'est pas non plus fixé. Il utiliserait le Fresquel jusqu'à l'Aude, mais son arrivée sur la côte est d'abord envisagée au grau de la Nouvelle en passant par Narbonne.
En 1663, Riquet réalise des études de terrain pour enfin fixer le trajet du côté Atlantique par le seuil de Naurouze le long de la vallée de l'Hers-Mort jusqu'à Toulouse en aval de la Garonne. La partie navigable du fleuve se trouve en aval du Bazacle, une chaussée située au centre de Toulouse, bloquant la navigation. En effet, le canal ne pouvait éviter de passer par le cœur économique de la région. Il écarte donc ses tracés via Castres et par le Girou.
Techniques d'étude
Pierre-Paul Riquet n'a aucune formation technique et s'est formé sur le tas. Il pratique de façon régulière l'expérimentation et l'observation de terrain. Sa technique reste donc très empirique car à l'époque, les sciences appliquées et les techniques hydrauliques à travers des lois ou des concepts ne sont pas maîtrisées:45. Toutefois, Riquet a une démarche scientifique car il effectue systématiquement des mesures de débits et des calculs de volumes. De plus, pour pallier ses insuffisances techniques, il s'entoure de nombreux techniciens comme Hector Boutheroüe, François Andréossy, géomètre et cartographe et Pierre Campmas, fontainier.
De même, il met en place des expérimentations comme la rigole de la Plaine qui lui permet de prouver qu'il est possible d'amener l'eau jusqu'au seuil de Naurouze depuis la rivière du Sor dans la montagne Noire. Il construit également dans sa propriété de Bonrepos une maquette du canal du Midi avec des écluses, des tunnels et des épanchoirs en respectant les pentes et en alimentant l'ensemble avec de l'eau:44.
Contexte politique et économique
Le contexte économique du pays est assez difficile. Lorsque Colbert devient ministre, il estime que le commerce national et international n'est pas en faveur du royaume de France. Les Hollandais tirent un meilleur parti du commerce et de l'activité économique du pays. Le prix des céréales baisse beaucoup et la production de vin chute en 1660. Cette crise provoque une dépréciation des terres et les petites exploitations agricoles font faillite. De plus, le Languedoc est une région où les troubles ont été nombreux lors des conflits religieux ou pendant la Fronde. Il est difficile de mettre en place une politique dans cette région et notamment d'instaurer des taxes comme la gabelle:42.
Colbert voit donc en Pierre-Paul Riquet et son projet une façon de mener une politique d'expansion économique au service de l'absolutisme en Languedoc. En effet, Riquet se propose pour mettre en place la gabelle et pour construire le canal du Midi. Ainsi, la construction du canal permettrait de créer un passage direct entre la mer Méditerranée et l'Atlantique sans passer par le détroit de Gibraltar contrôlé par les Espagnols, le but étant de ruiner le commerce espagnol et de mettre en place un flux commercial à travers le Languedoc. Le Lauragais dispose de nombreuses ressources comme le blé, le vin du Minervois, des draps, la soie et le sel que les producteurs ont du mal à exporter faute de moyens de commerce:43. À travers le canal du Midi, Colbert espère diffuser les matières premières dans les différentes régions du Midi, renforcer le pouvoir royal et désenclaver Toulouse et sa région:13.
L'édit de Louis XIV et le financement du projet
Même si le projet semble bancal, Louis XIV autorise le lancement des travaux par un édit royal en octobre 1666 après l'accord de Colbert et d'une commission d'experts qui se penche sur le tracé du canal pendant plusieurs mois. Le projet bénéficie notamment de l’appui de l’ingénieur en fortifications et hydraulicien Clerville qui a pesé de son influence auprès de Colbert pour faire démarrer le projet. L’édit précise l'autorisation de la construction du canal, sa mise en adjudication et son attribution à son concepteur, Pierre-Paul Riquet, et à ses descendants. Il donne aussi des droits d'expropriation à Riquet et décrit la possibilité de créer des moulins, des entrepôts et des habitations pour le fonctionnement du canal. Le projet formera un « fief » exempt d'impôts dont le propriétaire aura les droits de pêche et de chasse. Enfin, il décrit les modalités de fonctionnement notamment la mise en place de péages, l'organisation du trafic et la propriété des embarcations. Le roi prend la décision de céder la propriété et l'exploitation de l'ouvrage à un particulier afin de s'affranchir des éventuels inconvénients d'un ouvrage si grand. Ce système garantit la continuité de l’entretien et du fonctionnement du canal, même si les finances de l'État sont au plus bas:57.
Les travaux sont lancés en deux phases appelées chacune « entreprise ». La première consiste à relier Toulouse à Trèbes et est estimée à 3 600 000 livres:16. Mais, les finances de l'État ne sont pas très positives et les États généraux du Languedoc ne sont pas prêts à financer un tel projet de peur que leurs fonds soient utilisés pour des dépenses imprévues:46. Alors, en échange du droit de propriété et d'exploitation du canal, Pierre-Paul Riquet propose de financer sur ses fonds propres une partie des travaux. Le reste est payé par l'État en échange des bénéfices que Riquet réalise avec la taxe sur la gabelle. La deuxième entreprise de travaux, entre Trèbes et l'étang de Thau, en décembre 1668, coûte 5 832 000 livres ainsi qu'un million de livres supplémentaires pour la reprise des travaux du port de Sète:51.
En définitive, alors que le budget initial était de six millions de livres, l'ensemble des travaux aura coûté entre 17 et 18 millions de livres de l’époque, une somme avancée pour 40 % par le Roi, 40 % par la province et 20 % par Riquet lui-même, qui en deviendra le propriétaire. Ses descendants continueront de payer 2 millions de livres pendant plus de 50 ans:72.
Réalisation du canal
La première « entreprise » des travaux débute le 1er janvier 1667 avec la construction de la rigole de la plaine, puis se poursuit le 15 avril 1667 avec la pose de la première pierre du lac de Saint-Ferréol:18. À l'origine, Riquet voulait construire une dizaine de réservoirs mais le commissaire général des fortifications, Louis Nicolas de Clerville, lui demande de les remplacer par un seul réservoir. Il s'agit là d'une grande nouveauté pour l'époque, aucun lac-réservoir de cette ampleur n'ayant jamais été réalisé auparavant. En novembre 1667, une cérémonie officielle pose la première pierre de l'écluse de la Garonne à Toulouse, et donc du canal, en présence des représentants du parlement de Toulouse, des capitouls et de l'archevêque de Toulouse, Mgr d’Anglure:79. Une première mise en eau est réalisée entre le seuil de Naurouze et Toulouse durant l'hiver 1671-1672 et la première circulation de bateaux peut débuter. En 1673, le tronçon Naurouze-Trèbes est achevé, marquant la fin de la première « entreprise de travaux ».
Dès 1671, débute la deuxième entreprise qui consiste à relier Trèbes à la mer Méditerranée et à construire le port de Sète (à l'époque appelé Cette, emplacement choisi et port construit par Clerville). Cette partie du canal pose des problèmes au niveau de la jonction entre l'étang de Thau et Trèbes car le canal doit traverser le cours de l'Hérault et celui du Libron. Pour contourner le problème, l'ingénieur Riquet met en place un système de vannes et de caissons pour le Libron ainsi qu'une écluse ronde à trois portes pour l'étang de Thau et l'Hérault:64. L'écluse ronde d'Agde permet de passer un bief du canal du Midi mais aussi d'accéder à l'Hérault. Cette partie du canal pose aussi des problèmes au niveau du seuil d'Ensérune et de la descente vers Béziers dans la vallée de l'Orb. Riquet résoudra ces problèmes d'une part en creusant la voute de Malpas, et d'autre part en construisant à Fonserannes une enfilade de huit sas d'écluses jusqu'à l'Orb. En 1681, les travaux du canal se terminent à Béziers. Cependant, en octobre 1680, Pierre-Paul Riquet meurt durant les travaux. Il ne voit donc pas la fin de son projet. C’est l'ingénieur du roi, La Feuille, qui prend le relais.
En mai 1681, le canal est complètement inspecté sur ordre du roi afin de vérifier les travaux et la bonne étanchéité du canal. Il est alors officiellement ouvert à la navigation le 15 mai 1682. Lors de l'inauguration du canal à Toulouse, le 15 mai, l'intendant du roi et le président des États généraux du Languedoc voyagent les premiers sur le canal, suivis de nombreuses autres barques transportant notamment du blé. Après ce voyage inaugural, le canal est remis à sec car les travaux ne sont pas terminés ; ils ne le seront réellement qu'en décembre 1682:53. Le canal est ouvert au trafic en mai 1683 et l'arrêté de réception des travaux publié en mars 1685:69.
Organisation du travail et conditions sociales
Riquet se refuse, comme l'y autorise le roi, à employer des paysans suivant le régime de la corvée, et plus particulièrement de la corvée royale comme cela sera pratiqué pour la construction des route par Trudaine. Pendant quinze ans, Riquet embauche des hommes et des femmes (environ un tiers) entre 20 et 50 ans qu'il organise en sections formant des ateliers dirigés par un contrôleur général. Le chantier atteint un maximum de 12 000 ouvriers. Cette rationalisation du travail permet d'optimiser les tâches et de réaliser plusieurs chantiers à la fois. L'ensemble des travaux est manuel et le creusement du canal se fait à la pelle et à la pioche, les hommes transportant la terre sur des civières, les femmes sur leurs têtes. La main d'œuvre est constituée de paysans et d'ouvriers locaux dont le nombre fluctue d'une période à l'autre de l'année. Pierre-Paul Riquet fait alors appel aux militaires pour pallier cette fluctuation. Il met aussi en place la mensualisation des payes des ouvriers pour les fidéliser:18. Il propose aussi le logement pour deux deniers par jour.
Les conditions financières et sociales d'emploi de ces ouvriers sont très favorables et inhabituelles pour l'époque. Pour garder sa main-d'œuvre, Riquet paye assez bien ses ouvriers. Mais surtout, il donne des avantages sociaux jamais autorisés auparavant comme les jours de pluie chômés, les dimanches et les jours de fête rémunérés et enfin les congés maladie. Le contrat de travail est individuel et se fait par recrutement libre. La paye est au début de 20 sols par jour, le double d'un salaire agricole. Mais, avec le mécontentement des propriétaires agricoles, Riquet baisse la paye à 15, puis 12 sols par jour. En 1668, il instaure le paiement mensuel de 10 livres:55.
Métiers et moyens mis en œuvre
Plusieurs métiers se rencontrent sur les chantiers du canal en plus des ouvriers saisonniers qui sont le plus souvent des agriculteurs. Les maçons et les tailleurs de pierre sont chargés de la construction des ouvrages d'art comme les ponts, les écluses et les épanchoirs. Les forgerons et les niveleurs sont chargés de l'entretien de l'outillage. Les charretiers et les voituriers, les maréchaux-ferrants et les propriétaires de moulins à scies sont aussi réquisitionnés pour les travaux.
Les ouvriers sont organisés en sections contrôlées par des capitaines et des brigadiers. Enfin, Pierre-Paul Riquet est entouré de proches collaborateurs comme les contrôleurs généraux et les inspecteurs généraux du canal:56.
L'outillage des ouvriers est très limité : pioches, houes et pelles pour creuser, paniers et civières pour le transport des matériaux. Ils sont fournis aux ouvriers qui doivent les entretenir eux-mêmes. La poudre est utilisée pour faire exploser la roche.
Inauguration
En 1681, la première inspection a lieu « à sec ». Le roi désigne une commission, composée d'Henri d'Aguessau, intendant du Languedoc, de Ponce Alexis de La Feuille de Merville, commis à la surveillance des travaux du canal, du jésuite Matthieu Mourgues, des deux fils et des deux gendres de Pierre-Paul Riquet, ainsi que de MM. Andréossy, Gilade et Contigny. Cette commission embarque à Béziers le 2 mai 1681 et remonte le canal vers Toulouse durant six jours. Le remplissage se fait au fur et à mesure de l'avancement des vérifications jusqu'à Castelnaudary (le tronçon Toulouse - Castelnaudary étant en eau depuis 1672).
L'inauguration proprement dite a lieu juste après cette première inspection. Les mêmes personnalités rembarquent à Toulouse le 15 mai 1681 sur une barque amirale, suivie de dizaines d'autres embarcations. Le cardinal de Bonzi, archevêque de Narbonne et président-né des États généraux du Languedoc se joint au cortège, qui arrive à Castelnaudary le 17 mai. Une grande cérémonie religieuse a lieu le 18 mai à l'église Saint-Roch, suivie d'une procession vers le canal, pour bénir l'ouvrage, le convoi et l'assemblée présente.
Le convoi reprend sa navigation le 20 mai, avec des arrêts le 20 au soir à Villepinte, le 21 à Penautier, le 22 à Puicheric et le 23 à Roubia. Le 24 mai, c'est le passage dans le tunnel de Malpas, ainsi que le franchissement des écluses de Fonsérannes. Le cardinal et les évêques descendent à Béziers le même jour.
Travaux supplémentaires
En 1686, Vauban est chargé d'inspecter le canal. En effet, cinq ans après son inauguration, celui-ci fonctionne mal. Riquet, qui craignait de manquer d'eau pour alimenter le canal, avait fait déboucher de nombreux ruisseaux directement dans le canal. Mais ceux-ci lors des crues d'orage apportent du sable et quantité d'alluvions si bien que le canal est rapidement menacé d'ensablement. De plus, le système d'alimentation du réservoir de Saint-Ferréol, principale réserve en eau du canal, s'avère peu efficace:21.
Vauban ordonne à Antoine Niquet, ingénieur des fortifications pour le Languedoc, de nouveaux travaux au niveau de la montagne Noire avec le percement de la voûte des Cammazes pour prolonger la rigole de la montagne et le renforcement du barrage de Saint-Ferréol pour augmenter sa capacité. Il fait aussi construire de nombreux ouvrages maçonnés pour isoler les cours d'eau qui se jettent dans le canal, ainsi que des épanchoirs pour réguler le niveau de l'eau. Il édifie quarante-neuf aqueducs et ponts-canaux dont ceux de la Cesse, de l'Orbiel et de Pechlaurier. Enfin, il renforce une grande partie des ouvrages et des digues initialement construits par Riquet. Ces travaux, qui durent jusqu'en 1694, améliorent grandement l'alimentation et la gestion de l'eau. Antoine Niquet a la charge de la surveillance du canal jusqu'en 1726.
Cependant, le canal du Midi possède encore des lacunes car il ne passe pas par Carcassonne ni par Narbonne et ne rejoint pas le Rhône. De plus, pour rejoindre Bordeaux, il faut emprunter la Garonne aux débits variables et aux crues violentes. Le canal de Jonction est creusé de 1775 à 1780 et permet de rejoindre Narbonne via le canal de la Robine et le port de commerce de Port-la-Nouvelle. En 1776, le canal de Brienne permet de contourner la chaussée du Bazacle, un gué sur la Garonne à Toulouse. La liaison entre l'étang de Thau et le Rhône est également achevée en 1808 sous la direction de l'ingénieur des ponts et chaussées Victor Dalmas:22-23. En 1810, un détournement du canal permet à Carcassonne d'être reliée au canal du Midi. Enfin, en 1857, le canal latéral à la Garonne est mis en eau entre Toulouse et Castets-en-Dorthe. L'ensemble de ces travaux marque le complet achèvement de la liaison entre l'océan Atlantique et la mer Méditerranée dont rêvait Pierre-Paul Riquet.
Fonctionnement et vie du canal
Autrefois, utilisé pour le transport de marchandises et de personnes, le canal du Midi est aujourd'hui essentiellement fréquenté par les plaisanciers et les touristes.
Gestion
La gestion du canal est assurée dans un premier temps par les descendants de Riquet. C'est l'aîné Jean-Mathias qui prend le contrôle du fief jusqu'en 1714, puis Victor-Pierre-François jusqu'en 1760, puis Victor-Maurice et enfin Jean-Gabriel. La famille Riquet met très rapidement en place une organisation pyramidale avec un « directeur général du Canal » qui régit un ensemble de directeurs responsables d'une zone géographique du canal. Sept zones sont définies d'ouest en est : Toulouse, Naurouze, Castelnaudary, Trèbes, Le Somail, Béziers et Agde. Chaque directeur est responsable des travaux d'entretien de sa zone ; il est épaulé par un receveur et un contrôleur. Plusieurs centaines d'éclusiers ont la charge des écluses du parcours. Cette organisation facilite le contrôle et engendre des lignées d'employés.
À Toulouse, un groupe de trois personnes forme un comité de direction : le directeur général des travaux, le receveur général qui fixe les taxes et le contrôleur général chargé de la comptabilité. La gestion du canal assure l'apport d'argent afin de payer les divers travaux et le personnel embauché pour le canal. Dans les années 1770, les taxes rapportent un produit annuel de 640 000 livres, consacré pour moitié à l'entretien et aux salaires, et pour moitié aux bénéfices et aux fonds pour des travaux exceptionnels. En 1785, ce bénéfice augmente jusqu'à 950 000 livres, ce qui était une somme très importante pour l'époque:93.
Sous Napoléon Ier, les actions du canal furent constituées en majorat au profit de proches de l'empereur.
Entretien
Aujourd'hui, l'entretien du canal se fait grâce aux péniches des voies navigables de France.
L'entretien du canal constitue un vrai problème pour les descendants de Riquet. Malgré les nombreuses précautions, le canal s'ensable et s'envase avec les alluvions provenant de l'eau d'alimentation. De plus, il se comble avec les branchages et les feuilles des arbres. Chaque hiver, une période de chômage permet de nettoyer le canal. Il faut recreuser le lit du canal tous les ans pendant deux mois. Ces travaux coûtent cher et deux mois ne suffisent pas toujours. Un autre problème est l'envahissement du canal par des herbes au niveau des retenues et des épanchoirs. Aucune méthode ne permet d'éradiquer ce fléau. En 1820, le dragage est mis en place pour arracher les herbes et remonter la couche de vase.
Enfin, la pluie, le gel et la sécheresse obligent les gestionnaires à avoir un œil sur tout le parcours du canal afin de réparer les fuites et brèches qui pourraient s'ouvrir. Aujourd'hui encore, le canal est soumis aux mêmes contraintes et les gestionnaires doivent assurer les mêmes travaux. Ils sont désormais mécanisés. Environ 350 employés sont mis à disposition du gestionnaire Voies navigables de France par le ministère de l’Écologie, de l’Énergie, du Développement durable et de l’Aménagement du territoire afin d'assurer l'entretien.
L'économie autour du canal
Dès sa mise en service, le canal est utilisé pour le transport des voyageurs et du courrier. Un service de « malle-poste » est mis en place sur des bateaux empruntant le canal. Comme pour les diligences de la malle-poste, les bateaux sont tirés par des chevaux sur les chemins de halage. Ce type de transport est considéré comme moderne pour l'époque, grâce à sa régularité, son confort, sa sécurité et sa rapidité qui constituent une amélioration par rapport à la route. De plus, le trajet peut s'effectuer toute l'année. La durée du voyage est de quatre jours de Toulouse à Sète.
Cette durée sera réduite à 32 heures en 1855, ce qui correspond à une vitesse de 11 km/h, grâce au remplacement fréquent des chevaux (tous les 10 kilomètres) qui tirent les bateaux. En outre, plutôt que de franchir les multiples écluses, les voyageurs sont transférés d'une embarcation à une autre, ce qui permet de gagner du temps et d'économiser l'eau qui s'écoule lors de l'ouverture des écluses. Enfin, les trajets se déroulent également de nuit pour gagner encore du temps.
En 1684, le voyage Toulouse-Agde coûte 1 livre et demie. Le tarif est fixé par lieue renseignée par une colonne. Ainsi, un bourgeois paie 3 sols par lieue tandis qu'un valet ou un matelot paie 1 sol et demi par lieue. Des bureaux de paiement se trouvent tout le long du parcours. Chaque bureau indique le tarif et fournit les distances entre deux bureaux.
Le canal relance le commerce du blé et du vin en Languedoc, son but principal. Ce trafic commercial a pour effet d'enrichir très rapidement les descendants de Riquet. Le blé, le vin et l'alcool peuvent être exportés du Lauragais vers Toulouse, Bordeaux et Marseille. Le canal a pour effet d'élargir la zone de vente des producteurs du Languedoc. Dans les années 1730-1740, ce commerce est prospère et les structures agricoles s'améliorent fortement. Le canal permet aussi d'importer en Languedoc des produits d'autres régions, comme le savon de Marseille, le riz, l'amidon, du poisson séché ou encore des épices et des teintures. Cependant, il ne sera jamais la grande voie internationale ambitionnée par les rois de France, car son trafic se limitera à des échanges nationaux voire locaux:80-81.
Le tarif du transport des marchandises dépend de la matière transportée. Ainsi, au XVIIe siècle, le transport du blé coûte 12 deniers par quintal, et celui de l'avoine 6 deniers par quintal.
Les embarcations
À son ouverture, le canal est emprunté par une majorité de barques destinées au transport de marchandises. Ces bateaux mesurent une vingtaine de mètres de long et sont halés par des chevaux ou des hommes:25. Le tonnage des navires augmente au cours des siècles, passant de 60 t à l'origine jusqu'à 120 t au début du XIXe siècle. Des barques propres au canal et appelées « barque de patron » ou « barque du canal », sillonnent aussi le parcours. En 1778, on en compte jusqu'à 250. En 1914, le canal compte encore 126 bateaux de patrons, 70 bateaux d'armateurs et de compagnie et 300 chevaux et 75 mulets:132. Dans les années 1930, les péniches à moteur ont complètement remplacé la traction animale. Elles relancent en partie le trafic marchand sur le canal. Mais la batellerie commerciale et marchande disparaît définitivement vers la fin des années 1980. L'année 1856 est l'année record pour l'activité marchande, avec plus de 110 000 000 tonnespagekilomètres de marchandises et près de 100 000 passagers transportés.
Pendant 250 ans, les chevaux ont tiré de nombreuses embarcations comme de rapides coches d’eau ou de longues barques marchandes. Le cheval peut tracter jusqu'à 120 fois son poids lorsque la charge se trouve sur l'eau. La traction animale était alors un élément stratégique du fonctionnement d'un canal.
Les barques de poste qui transportaient les voyageurs étaient des embarcations de quelques dizaines de mètres possédant un simple abri sur le pont. Ces barques ont évolué pour devenir plus rapides, plus luxueuses avec des salons et plus grandes puisque les plus importantes pouvaient atteindre 30 m de long. Les services à l'intérieur de ces bateaux ont aussi évolué avec des premières classes dans des salons privés et des secondes classes dans une salle commune. Durant les grandes heures du canal, certains bateaux ont comporté des salons de première classe où l'on servait à dîner.
Concurrence du rail
Curieusement, le canal ne remplit pas vraiment son office. Le contexte économique et politique empêche le développement économique que l'on avait escompté. Après deux cents ans d'exploitation, le canal commence à souffrir de la concurrence du rail puis de la route. Il connaît son apogée au milieu du XIXe siècle.
Le 20 mai 1858, la Compagnie du canal du Midi signe un traité avec la Compagnie des chemins de fer du Midi et du Canal latéral à la Garonne, concessionnaire de la ligne de Bordeaux à Sète. Ce traité prévoit que la Compagnie des chemins de fer du Midi prend à bail pour une durée de quarante ans le canal et ses dépendances. Une convention signée entre le ministre des Travaux publics et la Compagnie des chemins de fer du Midi le 29 mai suivant entérine le traité. Cette convention est approuvée par une décret impérial le 21 juin 1858. Cet acte a pour effet d'amplifier la baisse de la circulation des bateaux sur le canal. En effet, la compagnie favorise le chemin de fer en plaçant des taxes plus élevées sur le trafic commercial du canal. Le canal du Midi devient la voie fluviale la plus chère de France. De plus, le chemin de fer devient plus régulier et plus rapide que la voie fluviale, d'autant que le canal du Midi souffre de son tonnage limité:128.
La période avant 1859 correspond au fonctionnement du canal seul tandis que l'après 1859 correspond au début de l'installation des voies ferroviaires dans le sud de la France. La concurrence du rail est bien visible avec la division par deux du trafic de marchandises entre 1856 et 1879. Puis, ce trafic continue progressivement à décliner. Quant au chemin de fer, la ligne Bordeaux - Sète compte jusqu'à 200 millions de tonnes-kilomètres dès 1860:129.
Par une convention signée le 3 novembre 1896 entre le ministre des Travaux publics et la Compagnie du canal du Midi, l'État rachète le canal à l'échéance du bail de la Compagnie des chemins de fer du Midi et du Canal latéral à la Garonne, le 30 juin 1898. Cette convention est approuvée par une loi le 27 novembre 1897. L'État tente des investissements successifs pour maintenir la compétitivité du canal et supprime les taxes et péages, ce qui a pour effet de relancer le trafic sur le canal pour atteindre 80 millions de t.km en 1909.
La fin du trafic marchand
L'État tente de relancer les travaux de rénovation du canal en promulguant une loi-programme pour mettre le canal aux normes du gabarit Freycinet. En effet, les canaux du Nord de la France qui sont déjà aux normes connaissent un trafic bien supérieur au canal du Midi. Mais la loi reste inappliquée en raison du manque de crédits.
À la sortie de la Première Guerre mondiale, le trafic est complètement désorganisé. En 1920, le trafic de marchandises reprend rapidement grâce à l'arrivée des péniches à moteur. La compagnie HPLM (Le Havre-Paris-Lyon-Marseille) fait naviguer une trentaine de bateaux sur le canal du Midi. La Seconde Guerre mondiale voit un ralentissement du trafic en raison de la pénurie de pétrole, mais sa relance est rapide après le conflit et le trafic arrive à se maintenir à 110 millions de t.km. Le canal souffre cependant de sa taille trop petite pour les péniches modernes à fort tonnage. Le rail le concurrence de plus en plus et le transport routier devient aussi un second concurrent. La voie fluviale du Midi devient le troisième réseau de transport:140. Le trafic de marchandises cesse dans les années 1970. En 1980, il ne reste plus que deux péniches (le Bacchus, un pinardier, et l’ Espérance, un céréalier) assurant un trafic régulier entre Toulouse et Sète : elles cessent définitivement leur activité en 1989 à la suite de l'arrêt de la navigation prononcé par le Préfet de Région pour cause de sècheresse. En 1991, l'exploitation du canal est confiée à l'administration des voies navigables de France, qui reste aujourd'hui son gestionnaire.
Le canal au XXIe siècle
À partir de la fin du XXe siècle, le canal offre de nombreuses activités. Il joue tout d'abord encore son office de canal en permettant le transit de bateaux entre l'océan Atlantique et la mer Méditerranée.
Un canal pour le tourisme et les loisirs
Le canal du Midi est essentiellement utilisé par le tourisme, les loisirs et le logement:23. Il attire ainsi de plus en plus un tourisme fluvial, naviguant sur des bateaux de location, des bateaux-restaurants ou des bateaux-promenades. Ce tourisme s'est développé à partir des années 1960 sous l'impulsion de Britanniques puis a explosé dans les années 1980. Plus fréquenté que la Seine, il assure à lui seul un cinquième du tourisme fluvial français, et 80 % des passagers sont étrangers, essentiellement des Allemands, des Suisses et des Britanniques. On compte environ 10 000 passages de bateaux par an à l'écluse de Fonserannes, le pic de fréquentation se situant à l'écluse d'Argens avec 11 000 bateaux transportant en moyenne cinq passagers. Le canal permet d'employer directement environ 1 900 personnes. Les retombées économiques annuelles dues à l'activité du canal sont d'environ 122 millions d'euros. Sa navigation est ouverte du troisième samedi de mars à la première semaine de novembre. Hors de la période de navigation, la navigation est autorisée aux particuliers qui en ont fait la demande. La période d'hiver est appelée « période de chômage » et permet de réaliser tous les travaux d'entretien:49.
Le canal du Midi permet aussi de pratiquer d'autres sports, essentiellement dans les zones urbaines, comme l'aviron, le cyclotourisme, le patin à roulettes ou la randonnée pédestre sur les berges. Un tronçon goudronné de 50 km entre Toulouse et Avignonet-Lauragais et un autre de 12 km entre Béziers et Portiragnes se prêtent particulièrement à la pratique du vélo et du patin à roulettes. De plus, de nombreuses péniches ont été converties en logements familiaux, salles de spectacles, lieux d'expositions ou salles de restaurant.
Un canal pour l'eau
Durant la saison sèche, le canal sert de réservoir pour l'agriculture. Près de 700 vannes d'irrigation sont installées le long du canal. C'est l'un des rôles fondamentaux du canal et l'une des raisons de son maintien par l'État depuis la fin du commerce marchand. Le canal peut irriguer jusqu'à 40 000 hectares de terres agricoles.
La rigole de la plaine achemine l'eau du Sor qui est captée par la prise de Pont Crouzet pour l'irrigation avant de se déverser dans le canal du Midi. De plus, des prélèvements individuels sont réalisés au fil de l'eau sur le secteur compris entre Revel et le seuil de Naurouze. En 1980, le lac de la Ganguise est construit près de Castelnaudary permettant d'avoir une réserve d'eau de 22 millions de m³. En 2005, le barrage est surélevé afin d'atteindre la capacité de 44 millions de m³. Près de l'ancien bassin de Naurouze, la station de pompage de Naurouze permet de réguler l'eau du canal du Midi et l'eau du lac. Une conduite souterraine, la galerie de Mandore, provenant de la Naurouze conduit l'eau supplémentaire de la rigole de la plaine jusqu'au lac de la Ganguise. Et inversement, en période sèche, le lac de la Ganguise peut approvisionner le canal du Midi si l'apport d'eau de la rigole de la plaine n'est pas suffisant.
Le canal assure aussi l'alimentation en eau potable grâce aux usines de traitement des eaux de Picotalen (Picotalen I et Picotalen II) depuis 1973. Elles font partie des installations réalisées par l'Institut Interdépartemental pour l'Aménagement Hydraulique de la Montagne Noire (IIAHMN) depuis sa création en 1948 pour répondre aux besoins en eau du Lauragais. L'usine fournit de l'eau provenant du lac des Cammazes à près de 185 communes.
Un canal comme patrimoine
Alors que le canal était autrefois vu comme un outil de production, d'échange et de commerce, il est considéré comme un patrimoine architectural et technique, comme en témoigne le refus du maire de Toulouse Pierre Baudis de consacrer l’espace du canal du midi à une voie express urbaine:149. Il n'est cependant pas déclassé et reste ouvert à la navigation. Le 7 décembre 1996, le canal et une zone tampon de 2 000 km² sont inscrits sur la liste du patrimoine mondial de l'UNESCO. La même année, il est classé au titre de la loi française sur les grands sites. Ce classement est étendu aux rigoles de la plaine et de la montagne en 1996 et 2001. Il provoque très rapidement une augmentation de sa fréquentation touristique.
Cependant, son entretien n'est pas réalisé complètement car de nombreux acteurs sont impliqués : trois régions, six départements et les collectivités locales. Ces dernières ne veulent pas supporter le coût des travaux de restauration et n'osent pas toujours lancer des programmes de valorisation. Les platanes sont notamment une source de problèmes car leurs racines détruisent les berges et les pistes cyclables goudronnées, et leurs feuilles mortes envahissent le canal. De plus, ils sont fragilisés par une maladie (le chancre coloré). Le canal est un patrimoine lourd à entretenir car l'organisme gestionnaire des canaux français, Voies navigables de France (VNF), est spécialisé dans la gestion et la maintenance des canaux français dans le cadre d'un marché économique et commercial, et non dans celui du marché touristique dans lequel se situe le canal du Midi. De plus, les coûts d'entretien sont plus élevés que sur un réseau traditionnel du fait de l'ancienneté du canal. Aussi, l'exploitation du canal génère de faibles taux de bénéfices. VNF doit donc essayer de mettre en place des partenariats locaux pour valoriser le canal, son budget ne lui permettant pas d'assurer seul l'entretien et la surveillance des 360 km de canaux.
De plus, le classement au titre du patrimoine de l'UNESCO engendre un niveau de surveillance supplémentaire de la part de l'État qui doit s'assurer que toute modification des abords du canal et de ses ouvrages est compatible avec les enjeux de l'UNESCO. Or, un rapport de l'inspection générale de l'Architecture et du Patrimoine en 2003 a montré que le canal était en très mauvais état, que de nombreux travaux et infrastructures dévalorisent ses abords et enfin qu'il souffre d'une pression immobilière importante. En témoignent des constructions anarchiques, des aménagements mal pensés qui dénaturent le site, ou la construction de marinas modernes sur les ports du canal. Cependant, pour respecter l'uniformité d'aménagement du canal et soutenir un effort d'amélioration, le canal du Midi reste à la gestion de VNF sous la tutelle de l'État, qui souhaite créer une mission de suivi comme pour la Loire et le mont Saint-Michel.
En 2016, le préfet de la région Occitanie annonce que l'intégralité du canal du Midi sera inscrit au titre des monuments historiques.
Les ouvrages d’art
Le canal des Deux-Mers comporte au total 400 ouvrages d'art, dont 328 pour la partie canal du Midi avec notamment 63 écluses, 126 ponts, 55 aqueducs, sept ponts-canaux, six barrages, un épanchoir et un tunnel.
L'alimentation en eau du canal
Pour faire fonctionner à l'année les 240 kilomètres du canal, environ 90 millions de m³ d'eau sont nécessaires:29. Pour couvrir ces besoins en eau, Riquet a conçu et réalisé un système d'alimentation complexe mais qui s'est avéré fonctionner de manière efficace. Son idée est de capter les eaux de la montagne Noire, située à plusieurs dizaines de kilomètres, et de les amener au seuil de Naurouze, point le plus haut du futur canal, par l'intermédiaire de rigoles en tirant avantage du passage de la ligne de partage des eaux entre versant océanique et versant méditerranéen.
Deux rigoles sont creusées, la « rigole de la montagne » et la « rigole de la plaine » qui, initialement, connectent trois réservoirs au seuil de Naurouze : le bassin de Saint-Ferréol d'une contenance de 6,3 millions de m³, construit entre 1667 et 1672, un autre réservoir, beaucoup plus petit, appelé « Lampy-Vieux », remplacé au siècle suivant par le réservoir du « Lampy-Neuf », d'une contenance de 1,7 million de m³, construit entre 1777 et 1782 pour faire face à la dépense d'eau occasionnée par l'ouverture à la navigation de l'embranchement de La Nouvelle, et le bassin de Naurouze. Le fonctionnement était le suivant : la rigole de la montagne après avoir collecté les eaux de plusieurs ruisseaux du versant méditerranéen de la montagne Noire (Alzeau, Vernassonne, Lampy, Rieutort) franchissait la ligne de partage des eaux au lieu-dit « Le Conquet » et se jetait dans le Sor, sur le versant océanique, lui-même capté par la rigole de la plaine au lieu-dit « Pont-Crouzet ». Le bassin de Saint-Ferréol était quant à lui alimenté par le Laudot, ruisseau du versant océanique prenant sa source aux Cammazes, et ses eaux captées en aval par la rigole de la plaine au lieu-dit « Les Thoumazès ». La rigole de la plaine, grossie des eaux du Sor et du Laudot, alimentait le bassin de Naurouze et le canal.
La construction du barrage de Saint-Ferréol représente à l'époque une prouesse technologique. Long de 786 m et large de 149 m, il est constitué de trois murs parallèles en granit taillé d'environ 30 m de hauteur. Cependant, le bassin a du mal à jouer son rôle de réservoir, le débit du Laudot est insuffisant. Riquet était conscient du problème mais n'eut pas le temps de le résoudre. C'est Vauban qui, après sa tournée d'inspection du canal, décide le creusement de la percée des Cammazes (également appelée voûte Vauban) sous la ligne de partage des eaux. Grâce à elle, les eaux de la rigole de la montagne dévalent vers le bassin de Saint-Ferréol en empruntant le lit du Haut-Laudot, court-circuitant le Sor.
Pierre-Paul Riquet avait prévu et construit un troisième réservoir, le bassin de Naurouze, destiné à contrôler le débit du canal et autour duquel il avait imaginé la construction d'une ville nouvelle et d'un port qui ne verront jamais le jour. En effet, le bassin de Naurouze doit être abandonné à cause de son ensablement important:28. Un bief de dérivation est creusé pour éviter le bassin, par le sud.
Plus récemment, d'autres barrages ont été construits destinés principalement à l'irrigation et la production d'eau potable mais sur lesquels VNF dispose par décret de droits d'eau pour alimenter le canal : le barrage des Cammazes d'une capacité de 20 millions de m³ est mis en eau sur le Sor en 1957, le barrage de l'Estrade sur la Ganguise (42 millions de m³) en 1992 et, en 2001, le barrage de la Galaube sur l'Alzeau (8 millions de m³). Depuis le barrage de l'Estrade, une conduite forcée permet de sécuriser à la demande l'alimentation en eau du bief de Naurouze.
Actuellement, les rigoles connectent quatre réservoirs (Saint-Ferréol, les Cammazes, Lampy-Neuf et la Galaube). La rigole de la montagne mesure 24,27 km de long et possède 22 ouvrages d'art:160 entre la prise d'Alzeau et la percée des Cammazes. Tandis que la rigole de la plaine mesure 38,12 km de long avec 21,45 m de dénivelé et comprend 68 ouvrages d'art, entre Pont-Crouzet et le seuil de Naurouze.
Le système alimentaire en montagne Noire constitue la seule source d'eau du canal du Midi entre Carcassonne et Toulouse, soit 109 km de linéaire et 3,65 millions de m³ d'eau retenus dans les biefs. En aval de Carcassonne, des prises d'eau permettent d'alimenter la partie basse du canal vers la Méditerranée. Ainsi, les eaux du Fresquel, de l'Aude (prise d'eau de Villedubert), de l'Orbiel et de la Cesse viennent grossir celles du canal. La prise d'eau du barrage du Pont-Rouge sur l'Orb à Béziers assure un complément d'alimentation pour la partie est du canal. Située en rive gauche de l'Hérault, la prise d'eau d'Agde à l'écluse de Prades donne de l'eau pour la partie terminale du canal jusqu'à l'étang de Thau.
Les écluses
Les premières écluses construites dans la plaine toulousaine par Pierre-Paul Riquet sont expérimentales et ne le satisfont pas. De dimensions assez importantes pour l'époque, elles sont constituées d'un sas rectangulaire avec des pilotis de bois servant de fondations aux murs latéraux. Cette forme ne permet pas de retenir correctement les matériaux latéraux lorsque l'écluse est vide : elles s'effondrent sur elles-mêmes. Il redéfinit la forme de ses écluses de façon arrondie : ainsi les bajoyers, plus épais, sont plus résistants à la poussée latérale de la terre. Cette forme arrondie confère à l'architecture des écluses du canal du Midi un style dit « baroque »:57.
Les écluses sont construites en pierres de taille scellées à la chaux. Elles sont fermées par deux portes à double vantaux. Les portes, à l'origine en bois avec le moins de parties métalliques possibles, sont soumises à d'importantes contraintes d'humidité et de pression. Elles possèdent une « vantelle » commandée par une crémaillère qui permet d'évacuer l'eau du sas.
La taille nominale des écluses construites par Pierre-Paul Riquet est de 29,2 m de longueur, 5,8 m de largeur au niveau des portes, 11 m au centre de l'écluse et en moyenne 2,5 m de hauteur. De nombreuses écluses ont été modifiées au XXe siècle : elles ne possèdent donc plus les caractéristiques initiales.
Certaines écluses du canal sont des bijoux d'architecture. Ainsi, l'écluse ronde d'Agde possède trois portes : deux des portes permettent d'accéder à chaque côté du canal et la troisième donne accès au fleuve Hérault qui va à la Méditerranée. Ce système permet d'avoir un triple accès tout en protégeant le canal des crues du fleuve. De même, le canal possède plusieurs écluses multiples, c'est-à-dire possédant plusieurs sas accolés les uns aux autres. Ce système permet d'économiser des portes et des fondations aux endroits où la pente est la plus forte. La plus connue de ces écluses est celle de Fonserannes, qui possède huit sas:73-74.
Aujourd'hui, la plupart des écluses sont électrifiées, ce système remplaçant l'ouverture manuelle des vantelles et des portes des écluses.
Les ports
Plusieurs ports ont été aménagés à intervalles réguliers le long du parcours du canal afin de pouvoir charger et décharger les marchandises mais aussi pour assurer les haltes des voyageurs. Toulouse possède deux ports : le port de l'Embouchure est situé à la jonction entre le canal du Midi, le canal de Brienne et le canal de Garonne tandis que le port Saint-Sauveur est situé en centre ville près de la Halle aux Grains. Deux autres ports existaient à Toulouse mais ont été détruits pour l'aménagement urbanistique. Ainsi, le port des Minimes et le port Saint-Étienne ont été remplacés par des voies sur berges.
Castelnaudary possède un port de 7 hectares appelé « Grand Bassin » construit entre 1666 et 1671:47. Il servait de halte de mi-parcours entre Toulouse et Sète. L'île Cybelle située au milieu du bassin servait à protéger les péniches du vent marin, ainsi qu'un port technique situé à un kilomètre à l'amont. Carcassonne, aujourd'hui, une étape touristique importante du canal, possède un port construit en 1810 lorsque la ville a été rattachée au canal. Le port de Trèbes est un grand port qui dispose de nombreux amarrages pour les bateaux. On peut également citer le port de Homps qui était l'un des plus importants du canal et Le Somail qui était un lieu d'accueil et de repos très fréquenté. Enfin, juste avant son arrivée dans la mer Méditerranée, le canal possède deux ports : celui d'Agde au bord duquel se dresse encore son ancien hôtel de l'« Administration du Canal » et le port des Onglous à Marseillan qui est le dernier port avant Sète et son canal royal qui donne accès à la mer.
Des ports plus récents ont été construits comme ceux de Ramonville-Saint-Agne, dit Port-Sud, qui regroupe de nombreuses péniches ainsi qu'un ensemble résidentiel donnant directement sur le port, ainsi qu'un port technique situé à un kilomètre à l'amont, ou le Port-Lauragais situé près d'Avignonet-Lauragais sur une aire d'autoroute de l'A61.
Les ponts-canaux
Plusieurs ponts-canaux ont été construits sur le parcours du canal du Midi. Ils permettent de traverser des rivières qui risqueraient de perturber le débit d'eau du canal. En effet, ces rivières se jetant dans le canal provoquent un trop-plein d'eau lors des crues et le comblement du canal par l'apport d'alluvions. Quelques ponts-canaux datent de l'époque de Pierre-Paul Riquet, mais la plupart ont été construits après la finalisation du canal lors notamment des perfectionnements préconisés par Vauban. Quelques ponts-canaux du canal sont les suivants (dans le sens Toulouse-Sète) :
- le pont-canal de Madron ;
- le pont-canal de Rieumory ;
- le pont-canal de la Joncasse ;
- le pont-canal de Nostreseigné ;
- le pont-canal d'Ayguesvives ;
- le pont-canal d'Encons
- le pont-canal de Négra ;
- le pont-canal de Gardouch ;
- le pont-canal de l'Hers ;
- le Pont-canal de Vasague ;
- le pont-canal de Radel ;
- le pont-canal de Tréboul ;
- le pont-canal de Mezuran ;
- le pont-canal de l'Espitalet
- le pont-canal de Rébenty ;
- le pont-canal d'Elfaix ;
- le pont-canal de Sauzens
- le pont-canal de Saume ;
- le pont-canal du Fresquel est construit début 1800 et inauguré le 31 mai 1810, à la suite de la modification du tracé, pour passer dans le centre de la ville de Carcassonne, ville qui n'avait pas voulu du canal à sa création ;
- le pont-canal de l'Orbiel à Trèbes ;
- le pont-canal de l'Aiguille ;
- le pont-canal du Rivassel ;
- le pont-canal de l'Argent-Double ;
- le pont-canal de Jouarres ;
- le pont-canal du Répudre est construit entre 1667 et 1676 pour enjamber le Répudre près du village de Paraza, petit affluent de l'Aude dont le débit est trop variable surtout en hiver (longueur du pont : 135 m), c'est aussi le premier pont-canal construit par Pierre-Paul Riquet ;
- le pont-canal de l'Ognon ;
- le pont-canal de Cesse ;
- le pont-canal de l'Orb, qui n'est pas contemporain de Riquet, a été inauguré en 1857, supprimant ainsi le passage des bateaux dans le lit de l'Orb à Béziers par l'écluse Notre-Dame.
- Ouvrages du Libron
Le pont-canal des Herbettes, achevé en 1983, permet au canal d'enjamber non pas un cours d'eau mais le périphérique de Toulouse.
Les autres ouvrages
Pierre-Paul Riquet a construit d'autres ouvrages sur le canal du Midi. Parmi les ouvrages d'art construits le long du canal, certains sortent du lot :
- le tunnel de Malpas long de 165 m au sud-est de l'oppidum d'Ensérune, et qui permet de franchir une colline de 50 m d'altitude, fut un défi technique pour l'époque ;
- l'épanchoir de l'Argent-Double situé à La Redorte, œuvre constituée en pierre de taille de onze arches successives et contemporaine de Vauban, son concepteur, a été construit par Antoine de Niquet et permet de rejeter le trop-plein d'eau hors du canal ;
- la pente d'eau de Fonserannes, qui permet de court-circuiter l'ensemble des huit sas de l'échelle de Fonserannes, a été construite à l'époque où le canal devait être mis au gabarit Freycinet, pour gagner du temps et permettre d'accepter de plus gros bateaux ; elle possède une machinerie unique dont l'entretien est coûteux mais, depuis quelques années, VNF tente de la réhabiliter pour réduire le temps d'attente aux écluses de Fonserannes ;
- les ouvrages du Libron, réalisation unique en son genre, permettent au canal de franchir le cours du Libron, près d'Agde ;
- les moulins à eau du canal du Midi situés en dérivation à de nombreuses écluses (par ex : Naurouze, Gay, Trèbes, Matabiau, Minimes, Castelnaudary, Castanet, Béziers, etc.) et qui utilisaient le dénivelé pour actionner des meules à céréales dès la mise en service du canal. Par la suite, elles se transforment en véritables complexes minotiers au cours du XVIIIe siècle.
La faune et la flore
Le canal est un long ruban d'eau qui s'étire au milieu du paysage et attire de nombreuses espèces animales. Plusieurs espèces de poissons comme les brèmes s'y reproduisent mais aussi des espèces comme les carnassiers qui viennent des rivières alimentant le canal. Des mollusques comme des anodontes, sorte de moules d'eau douce, ou des corbicules, sortes de coques d'eau douce, sont aussi présents dans les eaux du canal. Des ragondins et des rats musqués aiment également creuser des terriers dans les berges. Enfin, de nombreuses espèces animales viennent boire l'eau du canal.
C'est aussi un lieu très végétalisé. À l'origine, Pierre-Paul Riquet plante des arbres pour stabiliser les berges du canal, surtout là où il est en surplomb des terrains avoisinants. Le saule est très utilisé pour sa croissance rapide. L'ingénieur plante aussi du côté du canal des iris pour réduire l'éboulement de ses berges. Au XVIIIe siècle, les arbres plantés le long du canal deviennent une source de revenu. Ainsi, des mûriers sont plantés pour l'élevage de vers à soie. Puis, avec la fin de la culture de la soie en 1772, les mûriers sont remplacés par le peuplier d'Italie plus productif en bois. Les ouvrages et les maisons d'éclusiers sont agrémentés d'arbres fruitiers. À la Révolution, les plantations autour du canal représentent environ 100 000 arbres alors qu'il n'y en avait que 45 000 à l'origine. C'est sous l'Empire qu'on commence à planter des platanes, aujourd'hui la variété dominante le long du canal (42 000), pour remplacer les arbres coupés.
Cependant, depuis plusieurs années, les platanes du canal du Midi sont atteints par le chancre coloré, une maladie provoquée par un champignon microscopique, le Ceratocystis platani. Les premiers foyers ont été détectés en 2006. Le nombre de platanes infectés atteignant 83 en 2008 et 153 en 2009, des campagnes ponctuelles d'abattages ont été menées pour tenter d'enrayer la propagation, restées sans effet. De plus, il n'existe aucun traitement efficace contre le chancre. En 2011, 211 foyers et 1 338 arbres malades ont été identifiés. À terme, les 42 000 platanes du canal du Midi devraient être abattus et remplacés soit par d'autres essences (frênes, tilleuls), soit par une variété de platane résistante au parasite.
La protection d'un patrimoine mondial
La propagation rapide et massive du chancre coloré a poussé l'Etat à se préoccuper de la pérennité du Canal. Les platanes représentent une grande partie de la flore jouxtant le cours d'eau, et leur mort prématuré menace autant l'esthétisme du Canal que les promeneurs. C'est pourquoi le gouvernement a chargé l'organisme Voies navigables de France de la protection de ce patrimoine de la région Occitanie.
Depuis 2013, le service mécénat de l'entreprise collecte des fonds auprès de particuliers et d'entreprises, tous touchés par le délitement du Canal considéré comme un élément solide du patrimoine occitan. Les fonds sont ensuite utilisés pour trois activités.
La première est la découpe et la combustion des platanes infectés. Faute de solutions, cette méthode apparaît comme la plus viable pour endiguer l’épidémie[réf. souhaitée]. L'abattage d'une partie de la voûte arborée fragilise considérablement les abords du Canal, étant donné que les racines des arbres s'entremêlent à l'intérieur de ses berges. La consolidation de ces dernières est donc la seconde mission de VNF. Enfin, l'organisme s'occupe de la plantation de nouvelles essences, non touchées par le chancre coloré.
Ce champignon microscopique représente donc un danger direct pour le canal... mais impacte aussi la biodiversité. Les platanes sont en effet les habitations préférées de nombreuses espèces, et plus particulièrement celles de certain volatiles : certains oiseaux migrateurs, comme le rollier d'Europe, ne retrouvent ainsi plus leur habitat naturel au moment de leur migration vers notre continent. Voies navigables de France investit pour maintenir la diversité et la qualité de la vie animale aux abords du Canal du Midi : depuis 2015, c'est presque 900 nichoirs qui ont été installés sur les berges du cours d'eau. Différents types de nichoirs sont posés, afin de répondre de la manière la plus adéquate possible aux besoins des différentes espèces visées. Des installations sont par exemple prévues exclusivement pour les chauves souris, tandis que d'autres accueillent des espèces d'oiseaux.
Le canal du Midi comme modèle
Le canal du Midi s'inscrit dans les grandes réalisations de la fin du XVIIe siècle. Il s'inscrit aussi dans la pensée de Descartes qui pensait que la Nature ne pouvait pas être contrecarrée mais qu'il fallait l'utiliser, se l'approprier au sein de son système. C'est le « monde-machine » pour Descartes. Riquet a ainsi compris le système hydraulique de la montagne Noire et a su le contrôler pour servir le canal du Midi. Le roi Louis XIV qui en est le commanditaire laisse ainsi une marque de sa volonté de grandeur.
Le canal est aussi magnifié par l’ Encyclopédie ou Dictionnaire raisonné des sciences, des arts et des métiers de Diderot et D'Alembert en 1765, qui en relève l'utilité et la grandeur. Il le compare aux constructions romaines. Un autre encyclopédiste, Joseph Jérôme Lefrançois de Lalande, loue la réalisation architecturale et hydraulique dans son œuvre Des canaux de navigation et spécialement du Canal de Languedoc en 1778. De même, Bernard Forest de Bélidor félicite le concepteur dans Architecture hydraulique. Le canal devient un exemple en Europe car il reste pendant tout le siècle des Lumières le seul canal européen de cette taille:88.
Enfin, l'Américain Thomas Jefferson, homme politique, architecte et futur président des États-Unis, vient étudier le canal du Midi en 1789. Alors, ambassadeur des États-Unis en France, il envisage en effet, la réalisation d'un ouvrage similaire pour relier le fleuve Hudson au lac Érié, le canal Érié.
Les personnalités liées au canal
- Pierre-Paul Riquet, concepteur du canal du Midi. Il obtient du roi la propriété et l'exploitation du canal du Midi à vie pour lui et ses descendants. Il meurt en octobre 1680 avant la fin des travaux.
- Jean-Baptiste Colbert, Contrôleur général des finances du roi Louis XIV, chargé par le roi d'évaluer le coût et la faisabilité du projet de Pierre-Paul Riquet.
- Sébastien Le Prestre de Vauban, ingénieur et architecte du roi qui réalisa de nombreuses améliorations sur le canal du Midi entre 1685 et 1686.
- François Andréossy, proche collaborateur de Pierre-Paul Riquet qui le seconda durant tous les travaux. Il mena à bien la fin des travaux après la mort de Pierre-Paul Riquet.
- Louis Nicolas de Clerville, ingénieur français qui contrôla et surveilla l'avancement des travaux. Il aida et conseilla Riquet durant les travaux.
Texte tiré de l'article Wikipédia "Canal du Midi" et modifié 22 juillet 2019 sous la license CC-BY-SA 4.0 International.
Intervenants
- Jean-Polycarpe Maguès (ingénieur-en-chef)
- Henri Gautier (concepteur)
- Pierre-Paul Riquet (concepteur)
- François Andréossy (ingénieur)
- Ponce Alexis de La Feuille de Merville (ingénieur)
- Sébastien Le Prestre de Vauban (ingénieur)
Sites Internet pertinents
- Canal du Midi
- Canal royal de Languedoc / Canal du Midi
- Le Canal du Midi
- Le Canal du Midi en Languedoc: Le tracé détaillé
- Planète TP: Le canal du Midi
- Projet Babel: Dictionnaire des rivières et canaux de France: Canal du Midi et canal de jonction de la Robine
- UNESCO: Sites du Patrimoine Mondial: Le Canal du Midi
- Wikipédia: Canal du Midi
Publications pertinentes
- Architecture hydraulique. ou l'art de diriger les eaux de la mer et des rivières à l'avantage de la défense des places, du commerce et de l'agriculture. Ch.-A. Jombert, Paris (France). (1770):
- Un canal ... des canaux. Picard Éditeur, Paris (France). (1986):
- Le canal des Deux-Mers. Dans: Travaux, n. 37 (janvier 1936), pp. 33-37.
- Le Canal du Midi. Grands moments et grands sites. Editions du Beffroi, Millau (France), pp. 448. (1985):
- Le canal du midi. MSM, Vic-en-Bigorre (France). (2002):
- Informations
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10000077 - Publié(e) le:
23.01.2002 - Modifié(e) le:
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